lundi 18 février 2013

Délier les langues

3 février

Le Cartet

Mon neveu m'explique que le dimanche à Montréal, le brunch, c'est sacré.

Nous voilà donc amenées dans le Vieux Montréal, là ou les panneaux des rues sont rouges et délicats, sur la rue McGill, pour découvrir Le Cartet, un resto-boutique au nom étrange qui ne m'évoque rien, mais qui est si populaire, qu'il faut faire la file pour y déjeuner.

L'attente vaut la peine. Le personnel est courtois, souriant, affairé mais pas tendu. La clientèle : pareil! Tout le monde est en mode dimanche matin. Pas de tension, on est entre amis, les discussions commencent dans la file et se poursuivront à table. Et les sujets ne peuvent pas manquer puisque le hall de resto-boutique est garni d'immenses étagères qui montent jusqu'au plafond, remplies de chocolats de toutes sortes, variétés, parfums et marques. Ça ouvre l'appétit!

L'endroit est petit et rempli à craquer. Les assiettes sont originales et copieuses. Le Cartet offre un choix de brunch qui valent vraiment la peine. Avec jus, recherche de saveur, oeufs superbement cuisinés, choix de sucrés ou salés, inspirations originales. Nous avons mangé à en appeler la sieste de l'après-midi.

Mais la question se pose : le Cartet... c'est quoi ça?

Heureusement que mon champion-neveu a fait la recherche à ma place pour m'expliquer qu'il s'agit du nom de la grand-mère, à la cuisine de laquelle le restaurant fait honneur.

Allez-y, messieurs les cuisiniers, de Sherbrooke à Montréal, faites honneurs aux femmes et cuisinières de votre famille. Moi, je m'en délecte et je m'en réjouis :)

Fusion sucrée

2 février

La biscuiterie Sylvestre

En ce très beau samedi, je prends la route tardivement pour retourner à Montréal. Je dois passer prendre mon amie à Verdun et acheter quelques douceurs. C'est en tournant en rond avec mon légendaire 'sens de l'orientation-non paniqué-pas de gps parce qu'on se perd avec ces engins' que le hasard amènera mon grand nez devant : La biscuiterie!

Avec un nom pareil, la gourmande que je suis ne pouvais pas résister bien longtemps : j'imaginais déjà des monceaux de paniers remplis de sablés dorés de beurre et de sucre, saupoudrés de chocolat et de friandises, remplis de noix et de caramel. Je sentais la douceur des délicieuses collations m'appeler. Et après quelques tentatives 'maladroites-mais toujours calmes' de créneaux en pleine rue Wellington, je me stationnais avec un grand sourire, quasi droit devant la vitrine de La biscuiterie.

Sur le pas de cette petite boutique au nom évocateur, ce ne sont pas les paniers de biscuits qui nous accueillent, mais plutôt les sacs colorés et variés de bonbons. Les sablés que j'espérais sont sagements rangés plus loins. On en trouve une belle variété, mais pas aussi riche que mon imagination. C'est donc plutôt vers les bonbons en vrac que je me suis tournée avec intérêt.

Du fond de la boutique, le propriétaire, un petit asiatique discret et souriant, s'est empressé vers nous, sans déranger, et a proposé un panier, tout petit, juste la taille qu'il faut pour remplir ses yeux de régals multicolores, à la meilleure cliente de notre groupe : mon adolescente!

Nous nous sommes donc jetées le regard et les mains sur les friandises variées, parfumées, dures, tendres, colorées, qui faisaient le bonheur de chacune d'entre nous et des amis à gâter : nougat tendre; petits bonbons durs aux fruits assortis dans leur boîte de métal; rubans tricolores et surs, trempés de sucre; jujubes de fruits et yogourt aux formes variées; bonbons à la violette... Purs plaisirs d'enfance à emporter et partager!

dimanche 17 février 2013

Machination

1er février

Effets secondaires

J'assiste à la première du film sans aucune attente. La salle est comble. Au cours de la semaine, j'ai beaucoup entendu parler du film. Plusieurs collègues ont vu la bande annonce et sont emballés. Les spectateurs ont hâte de voir ce qui les attend. Personnellement, je suis ici pour me détendre. La semaine a pris une tournure éprouvante et c'est déjà un miracle que je me sois convaincue de venir au cinéma. Je viens me changer les idées. Je n'ai rien vu, rien lu, rien entendu du film, à part les attentes enthousiastes de mes collègues. Je ne suis ici que pour l'affiche et la distribution, qui m'ont semblé... sympathique...

Oups.

Comme quoi une image ne vaut pas toujours les mille mots qu'on pense.

Ça commence raide. Avec les soucis d'abord. Puis, au moment ou tout devrait bien aller : la chute. Tout chamboule, tout bascule. Les amoureux tentent de se serrer les coudes, mais... ce n'est pas jojo. Je repasserais pour le changement d'idées...

Et puis, il y a les médicaments : on entre dans la critique pharmaceutique, ces drogues sur lesquelles on a plus ou moins de prises. Les fameux effets secondaires. Et c'est là que ça commence à être tordu. Et plus le film avance, plus c'est tordu : les situations, les réactions, les personnages, les prétextes... pfff.

Donnez-moi un grand bain de médicaments dans tout ce beau monde-là! Je sors avec ce seul mot en bouche : tordu. Le film, l'abus de prescription de médocs, les manipulations perverses, et les scènes qui ne veulent rien dire. Malgré tout, le jeu des acteurs est très bon. Mais l'ensemble est amer... malade quoi. À voir dans votre salon seulement, si vous avez envie de regarder une histoire... tordue.

mardi 12 février 2013

Générateur

31 janvier

Je travaille pour les Expo-sciences depuis 1997. Un bail. Aujourd'hui, je suis allé voir ma première Expo-sciences locale de la saison. Il s'agit d'une exposition tenue à même l'école, primaire, secondaire et collégiale. Elles se déroulent généralement vers la fin de l'automne et le début de l'hiver, juste à temps pour sélectionner des participants pour les finales régionales, dont moi et mon équipe nous occupons.

Alors je me rends dans la salle d'exposition, généralement la cafétéria, et au milieu du brouhaha des classes qui visitent les exposants, je cible un stand sans visiteurs. C'est mon premier critère : un jeune, qui attend patiemment qu'on vienne écouter son projet de recherche. À partir de là, j'ai vraiment les pieds dans l'Expo-sciences, pour les trois mois à venir. Chaque année, ce sont ces jeunes qui me donnent le carburant de mon travail. Ils sont, l'un après l'autre : captivant, dynamique, amusant, intelligent, vif, timide, orateur, pédagogue, curieux, déterminé, vendeur, compétitif, créatif, inventif... bref, tous : brillants!

J'adore être à leur merci! J'écoute avec la plus grande simplicité, avec toute ma curiosité et beaucoup d'humilité. Je pose beaucoup de questions. Je veux qu'ils réalisent à quel point ils maîtrisent leur matière, comme il savent discuter des procédés, des montages, des découvertes, de l'histoire, sans cartons, sans mémorisation, simplement parce qu'ils connaissent, ils comprennent. Et surtout, ils le communiquent.

Mon organisme tiendra l'Expo-science Hydro-Québec, finale régionale de l'Estrie, les 15, 16 et 17 mars prochain, au Centre culturel de l'Université de Sherbrooke. Mais des exposants comme ceux que j'ai rencontré, au cours des trois prochains mois, il y en aura partout au Québec. Et chaque année, je le répète à qui veut bien m'écouter : donnez-vous la peine d'aller en écouter un, un seul, peut-être un autre, puis un autre... Quand vous sortirez de l'exposition, vous croirez en la jeunesse, en la relève, en l'avenir et le soleil sera juste un petit peu plus brillant dans vos yeux.

Prescription : une dose, chaque année :)

Gramme

30 janvier

Découverte d'un charmant café sherbrookois : le Singing goat. Avec des collègues et amies audacieuses, nous avons remonté la rue Alexandre, dans le centre-ville de Sherbrooke, pour nous initier à la cuisine végétarienne et vivante!

Bon, manger végétarien, ce n'est plus trop difficile. Je veux dire : nos épiceries regorgent de variété et de protéines qui nous permettent de cuisiner sans nécessairement intégrer de la viande. En plus, j'avais été initié il y a plusieurs années, quand des membres de ma famille aviaent suivis sérieusement ce régime. Mais là, on parle d'un véritable menu végétarien, quelque chose de plus élaboré, une véritable chimie culinaire, en saveurs, en ingrédients, pour donner un résultat coloré, savoureux, surprenant.

Personnellement, j'ai opté pour le pâté chinois :P Pas pu résister! C'est un plat que j'adore, avec ou sans viande. Mais ma voisine de table m'a fait goûter au plat à succès du jour : la pizza au légumes. Si l'appellation est simple, la composition est impressionnante. La croûte très mince est à base de noix et de légumes. Elle rappelle une tortillas bien grillée par la texture, mais les légumes et les noix se goûtent parfaitement. La base est faite d'houmous aux noix de cajou! puis généreusement garnie de légumes variés. Bref, l'assiette regorge de légumes, de noix, de couleurs, de saveurs, sous forme d'une pizza simple et pas effrayante du tout. Une véritable recherche dans l'assiette.

En plus le café a une touche bohème, avec ses nappes colorées et dépareillées, sa cuisine ouverte, ses ardoises. J'ai beaucoup aimé. Ils offrent quelque chose de très différent, très typique, qui vaut le détour. J'aimerais bien y retourner un soir, pour essayer leur menu gastronomique.

Si vous y passez, encouragez-les en achetant une très jolie carte postale de l'endroit. Pour 25 sous, vous soutiendrez cette belle initiative, et vous réjouirez le coeur d'un proche, une petite fille peut-être, à qui vous pourrez poster la carte en question.

Courant

29 janvier

Aujourd'hui, je suis allée à Montréal. J'y vais de plus en plus souvent. Pour de brèves visites. Et j'apprivoise tranquillement cette grande cité urbaine que j'ai pourtant toujours redouté.

Je suis native de Montréal. J'aurais pu croire qu'être native d'une ville donnait un certain attrait pour ladite cité! Eh ben non. Pas moi. Au grand jamais. Plus j'en suis loin, mieux je me porte. Montréal a toujours été pour moi la folie, la population, le monde, la stimulation à chaque coin de rue... Les excès aussi! Tant de monde et à la fois tant d'indépendance... Le choc social des premiers enfants itinérants. Les adolescents dans les rues. Les passants blasés. Les squeegees assidus. Les mendiants profiteurs... Pfff... pour la petite provinciale que je pense être, Montréal est étourdissante et déroutante.

Pourtant... La première fois que j'y ai conduit, persuadée que j'allais vivre l'enfer, agrippée désespérément à mon volant et les dents serrées... j'ai découvert une fluidité de la circulation, une certaine honnêteté des conducteurs : des clignotants, des 'céder le passage' naturels, des automobilistes qui vous laissent vous infiltrer dans leur voie sans essayer de renfoncer votre pare-choc... de la politesse au volant quoi! À partir de ce premier moment, conduire à Montréal a toujours été un plaisir.

Par contre, il aura fallu beaucoup, beaucoup plus d'années, avant qu'un soir de janvier, je m'aventure au coin des rues Mont-Royal et De Lorimier. La température était superbe : il neigeait à gros flocons. L'autoroute avait été difficile et ça faisait du bien de sortir de l'auto. Je me suis stationnée devant une boulangerie qui arborait encore des baguettes fraîches et dorées alors que le soleil se couchait entre chiens et loups. J'ai marché jusque chez mon amie, un seul coin de rue, toute seule, sac au dos, calmement, sans me sentir craintive, profitant des phares qui dansaient à l'heure de pointe, des arbres qui faisaient un dôme sur la rue, des escaliers en colimaçons collés les uns aux autres. Ce soir-là, pour la première fois, je me suis sentie bien dans ma ville natale.

Électronicienne

28 janvier

Je suis une fan de Roger Leloup, le créateur de Yoko Tsuno, une bande dessinée mettant en vedette une jolie électronicienne japonaise, qui vit ses aventures en technologies et sciences fiction.

Pour mon anniversaire, j'ai reçu mon album rituel : je les collectionne depuis le début de l'adolescence et je guette la sortie de chacun, qui se greffe à ma collection et m'amène à relire la série complète, question de bien situer chaque personnage. Une fois par an donc, je me lance dans les épopées de Yoko : 26 cette année.

J'ai également 'L'écume de l'aube', un roman qui raconte la première aventure de l'héroïne, fortement illustré, rempli de croquis du personnage, de son enfance à l'âge adulte. Un très beau livre.

Mais j'ai un faible pour 'Le pic des ténèbres'. Cet unique roman (jeunesse) de Leloup est fascinant pour les adeptes de sa littérature technologique. Leloup mêle l'histoire à la robotique dans toutes ses oeuvres. Fasciné par l'Asie, il transpose une belle passion de cette culture dans le soin et la grâce qu'il accorde à son héroïne. Quant à ses planches futuristes, ces câbles et ses cockpits de pilotage, ces vues détaillées de l'architecture des villes d'Europe : tout son travail, c'est comme si on y était.

Je dévore les bande dessinées de Yoko parce que j'ai si hâte de voir dans quel monde Leloup aura choisi de nous transporter. Et je relis chaque album avec délice pour m'attarder aux détails et à la recherche. Après, j'attends. Patiemment. Très patiemment. Douze longs mois. Parfois plus. La sortie du prochain album. Mais Leloup sait récompenser la patience de ses lecteurs par la qualité constante de ses dessins détaillés.

dimanche 10 février 2013

Dextrogyre

27 janvier

En chimie, un objet destrogyre dévie la lumière polarisée.

Ma petite lumière du samedi soir n'était pas polarisée. Elle était simplement une étincelle d'amitié, un clin d'oeil lumineux dans une salle comble pleine d'adultes trop sérieux.

La semaine dernière, pour mon anniversaire, mon amie m'a invitée à partager un dessert dans un café. Et hier, dans ce café bondé, prise dans nos discussions de filles sans fin, confortablement calées dans nos banquettes, à attendre ledit dessert, c'est une flamme qui étincelait dans tous les sens qui s'est dirigé vers nous.

Je n'ai même pas saisi tout de suite que ce joli feu de bengale sur la part de gâteau m'était destiné. Et alors qu'il était déposé devant moi avec les souhaits d'anniversaire tous simples de la serveuse, je tapais dans mes mains comme la gamine que je sais devenir, les yeux émerveillés devant ma première bougie d'anniversaire de l'année.

À ce moment, mon amie, ravie de sa surprise, m'a dit quelque chose de très gentil : 'Je savais que toi, tu saurais apprécier. Je ne l'aurais pas fait à n'importe qui.'

Eh bien oui. Il y a des petites choses formidables comme ça, dans la vie. Comme un feu de bengale dans une salle sombre, au milieu d'inconnus, qui brille juste pour vous, spécialement pour vous. Et qui vous donne ce qu'une autre de mes amies appelle avec beaucoup de bon sens : un petite tranche mince de bonheur.

Ma petite lumière du samedi dansait dans tous les sens. Pour mon plus grand plaisir. Et moi je vais continuer à vous éclabousser de mots pendant toute une année :)

Disposition

26 janvier

Mon demain est tardif. Mais le livre attendait sagement que je trouve les mots pour en parler.

Chronique de la dérive douce de Dany Laferrière.

J'ai parlé plus tôt de ma découverte de l'auteur dans 'La tension de l'immigrant', le 6 janvier. J'ai poursuivi avec les Chroniques, pensant à tort qu'elles avaient été écrites après. Je me suis rendue compte de mon erreur seulement après ma lecture, après quelques recherches. Mais cela n'a en rien gâché mon plaisir. Un plaisir plus rêche sans doute, plus dur, toutefois entier, en totale continuité avec L'énigme du retour.

Laferrière maintient ce style que j'ai découvert et que j'apprécie beaucoup : une prose poétique qui adoucit les moments durs, laisse respirer le lecture, rythme et cadence les émotions.

Il nous amène à Montréal, jeune immigrant haïtien, à la dérive de son départ précipité d'un pays chaud ou le rythme de vie et les raisons de vivre sont opposées à nos saisons. L'immigrant compare ce qu'il a quitté; s'empare de ce qu'il découvre. La vie est difficile pour le jeune noir montréalais dans une ville peut-être pas encore tout à faire prête pour l'immigration. De la pauvreté d'Haïti, on passe à celle de Montréal. On survit, on apprend à vivre, dans une société qui nous juge sans nous connaître, que l'on ne comprends pas, mais qu'on observe, avec intérêt et ouverture, alors même qu'il faut dire adieu au pays natal qu'on a quitté, contre son gré.

L'immigrant et le lecteur s'apprivoisent en douceur. Le premier sait qu'il doit trouver une place, et l'attends patiemment, sans rien bousculer, avec une immense résilience. Le dernier suit avec ébahissement, pour découvrir avec les yeux de l'autre, de l'étranger, son propre pays, sa propre ville.

... je ne regarderais plus jamais un pigeon de la même façon...